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Boli : «Pape c’était l’intelligence et le verbe»

Légendes
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OM.fr
Le Jeudi 2 avril 2020 à 06:00
Ambassadeur de l’OM, Basil Boli a connu Pape Diouf lorsqu’il était au centre de formation d’Auxerre. D’ami, il est devenu son agent et c’est avec beaucoup d’émotions qu’il nous a raconté «son» Pape Diouf.

«J’ai connu Pape Diouf en 1985 ou 1986 quand j’étais à Auxerre. Quand je descendais à Marseille avec l’AJA, Pape était le premier à m’appeler à mon arrivée à l’hôtel. Je me rappelle d’un repas dans un restaurant de La Plaine durant un été. C’était notre première rencontre en dehors du cadre professionnel. C’était très fraternel, c’est là que l’on s’est véritablement connu.


Il est devenu mon agent plus tard. Nous étions, avec Joseph-Antoine Bell, dans l’avion qui nous amenait au jubilé de Sarr Boubacar que Pape avait organisé. C’est là que nous lui avons dit, avec Joseph-Antoine, qu’il fallait qu’il devienne agent car toute la communauté était avec lui. C’était en 1988 à Dakar, dans une ambiance formidable. Pape était comme un poisson dans l’eau.
Ensuite, je rejoins l’OM. A l’époque, je vivais chez Abedi Pelé et après les matchs, on mangeait tous ensemble avec Pape. Ma femme étant Sénégalaise, elle préparait des plats traditionnels et on rigolait bien. Pape a commencé son métier d’agent avec Jo (Bell) et moi et ensuite il a intégré tout le reste.

 

Comme lui, j'ai le club dans le sang

 

Pape était un littéraire. Le Corona m’a pris deux personnes dans la vie, Manu Dibango et Pape, deux littéraires. Pape avait dans son bureau la photo de l’équipe de Hongrie en 1954, la bande à Puskas. Pour lui, c’était la meilleure équipe. Après 31 victoires, ils se font battre par les Allemands mais pour lui, c’était la meilleure équipe du monde, la meilleure du siècle, meilleure que la Hollande de Cruyff, c’est pour dire… Il a poussé mon petit frère Claude à être sociologue, agrégé dans sa spécialité. C’est grâce à Pape si Claude est Maître de Conférence. Ce virus nous a pris Manu (Dibango) aussi. Ils étaient dans le même esprit, Manu était aussi une bibliothèque, comme Pape. Il te parlait de Charlie Parker, Dizzy Gillespie, John Coltrane…

 

Pape a continué sa carrière jusqu’à devenir président de l’OM. On s’était un peu perdu de vue. Il m’en a un peu voulu que je soutienne Vincent Labrune mais, comme lui, j’ai le club dans le sang. Et je lui ai dit que, peu importe les personnes, pour moi, le club passe avant tout. Comme les Africains, il avait cet esprit familial. En Afrique, il y a le droit d’ainesse : face à une personne plus âgée, même si tu as raison, tu as tort.

 

Pape a remis le club à flot

 

Il a été choisi à la tête de l’OM pour son intelligence et ses connaissances. Il a pu ne pas se laisser influencer par l’entourage du club. Il a travaillé avec des gens qu’il connaissait très bien. Il a été très affecté par ce qu’il a traversé à l’OM. Il a toujours travaillé pour le club et il connaissait très bien Marseille et son environnement.
Pape a recruté des gens comme Eric Gerets. C’était risqué mais c’était l’homme qu’il fallait pour revenir au sommet. Et puis, c’est lui qui a recruté Didier Deschamps. C’est grâce à ce qu’il avait mis en place que l’équipe a gagné le titre en 2010. Il a remis le club à flot avec un investisseur derrière lui.

 

Pape, c'est le Senghor du football

 

Ces derniers temps, il m’avait dit d’appuyer sur le côté africain de notre démarche avec le club par rapport à ce que nous faisons à Dakar, à Abidjan, en Algérie. Ce sont les dernières discussions que nous avons pu avoir.

 

Senghor (Léopold Sédar Senghor, premier président de la république du Sénégal) en politique, c’est Pape dans le football. Pape c’était l’intelligence et le verbe. On perd un grand littéraire du football et il en reste peu…»