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26 mai 1993 : Le succès décortiqué

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OM.fr
Le Mardi 26 mai 2020 à 09:00
Coup de projecteur sur les statistiques fournies par Statsbomb lors de la victoire olympienne en finale de Champions League le 26 mai 1993 face au Milan AC à Munich.

Le 26 mai 1993, l’Olympique de Marseille a écrit la plus belle page de sa glorieuse histoire avec une victoire en finale de Champions League à Munich face au Milan AC. Au coup d’envoi, la rencontre était loin d’être gagnée tant le rouleau compresseur milanais affolait les compteurs. En quatre matchs à élimination directe (seizième et huitième de finale) et six de poules, les Italiens avaient signé 10 victoires, marqué 23 buts et en avaient encaissé… un. En championnat, c’était à peu de chose près la même domination avec seulement deux défaites, 65 buts marqués et 32 pris en 34 matchs. Bref, l’ogre milanais méritait bien son surnom.
L’OM a gagné cette rencontre pourtant les chiffres ne plaident pas en sa faveur. Les joueurs du Milan AC ont dominé les Olympiens dans quasiment tous les secteurs. Les rossoneri sont devant à la possession de balle, aux nombres de tirs, de tirs cadrés, de passes réussies et des expectated goals, un chiffre qui détermine la probabilité qu’un tir aurait dû déboucher sur un but en fonction de la position du frappeur, de l’angle de tir… Pourtant malgré cette domination statistique, ce sont les Olympiens qui ont soulevé la coupe au terme de la rencontre.
Ce jour-là, les joueurs de Raymond Goethals étaient tous à leur meilleur niveau. Ils ont tous parfaitement rempli leur mission et même un peu plus puisqu’ils n’ont pas hésité à dépasser leur fonction pour le bien de l’équipe, comme nous allons le voir dans les chiffres et tableaux ci-dessous.
A Munich, le maître-mot de l’Olympique de Marseille a été l’efficacité. Défensive bien sûr puisque Fabien Barthez n’a encaissé aucun but mais également offensive avec seulement 4 tirs, pour 2 cadrés et un but. L’efficacité était présente à tous les niveaux, dans les tacles, les interceptions, le pressing, les phases de transition à la perte de balle… C’est là que les Marseillais ont dominé les Milanais.

 

Dès l’entame, les Olympiens sont acculés malgré le pressing haut et la volonté de jouer le hors-jeu prônés par Raymond Goethals. Les Italiens se procurent des occasions, stoppées par Fabien Barthez, âgé de seulement 21 ans à l’époque ! Le gardien olympien a tout simplement sauvé le match de son équipe dans la première demi-heure avec de nombreux arrêts décisifs.

 

Shotmap OM

L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «Il y a eu peu de tirs et donc peu d’expected goals ce qui montre que l’OM n’a pas été très dangereux offensivement. Au niveau de la position, la moitié des tirs a eu lieu en dehors de la surface, et la valeur des occasions en termes d’expected goals depuis l’intérieur de la surface n’est pas très importante. Cela montre bien l’efficacité offensive de l’équipe sur ce match.»

 

Shotmap Milan

L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «Les tirs des Milanais sont proches des buts mais leur valeur en expected goals n’est pas importante. Barthez a sorti un grand match ce soir-là. Sur la lecture des statistiques «expected goals», Milan a eu plus d’opportunité de marquer et avec 1,27 contre 0,8 pour l’OM, les Italiens auraient dû gagner… C’est ce qui fait la magie du football.»

 

Sur le plan défensif, deux joueurs se démarquent au niveau des tacles et des interceptions. Didier Deschamps et Jean-Jacques Eydelie ont bien réussi à couper les actions milanaises avec 7 interventions réussies chacun. Jocelyn Angloma, sur la droite de la défense à trois, est à 5 et Abedi Pelé en a comptabilisé 3, soit autant que Marcel Desailly et un de plus qu'Eric Di Meco. Quand on évoque le dépassement de fonction, cette statistique de l’attaquant le prouve.

 

Tacles et interceptions

L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «C’est une donnée associée avec le pressing. Les Olympiens sont en ce qui concerne la récupération majoritairement restés dans leur zone d’influence.»


Toujours défensivement, l’efficacité marseillaise était à son meilleur niveau sur la pelouse bavaroise. En tête du tableau du pressing, le capitaine Didier Deschamps avec 25 phases de pressing, pour seulement un échec. Derrière Jean-Jacques Eydelie avec 20 pressings (pour 2 échecs). Le podium est complété par Marcel Desailly (15 pressings, 2 échecs) et Eric Di Meco (15 pressings, 5 échecs) qui a eu un peu plus de mal dans son couloir probablement parce que Rudi Voller jouait très haut et que Marcel Desailly couvrait beaucoup plus l’axe.

 

Pressing

L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «Deschamps était partout sur le terrain. Les ailiers sont restés sur leur côté et sont montés assez haut, ce qui est logique dans une défense à trois centraux. Desailly est monté assez haut sachant qu’il restait deux autres axiaux derrière lui. Cela permet de perturber les attaquants adverses et d’en faire décrocher un qui doit défendre un peu plus.»


Les phases de transition ont également eu leur importance et là encore le dépassement de fonction a eu un rôle primordial dans la rencontre. Bien que positionné en avant-centre, C’est Alen Boksic qui compte le plus de phases de pressing à la perte de balle (6 phases pour aucun échec). Il devance des joueurs à vocation défensive : Di Méco, Sauzée et Deschamps. A eux quatre, ces joueurs ne comptabilisent qu’un seul échec dans ces phases de jeu !

 

Contre-pressing

L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «C’est l’action de pressing à la perte de balle. Ce contre-pressing est souvent fait haut sur le terrain car on a plus de chance de se créer une action dangereuse et déstabiliser la défense adverse. On voit que Deschamps et Sauzée ont pressé haut sur le terrain. Ils ont alterné en sortant l’un après l’autre pour ne pas déséquilibrer l’équipe.»


Les tableaux de l’activité défensive de ces trois joueurs, Marcel Desailly pour la défense, Didier Deschamps au milieu et Alen Boksic en attaque montrent leur implication et leur importance dans le jeu. C’est encore plus flagrant pour Alen Boksic, attaquant de pointe qui est donc, comme le dit l’adage, le premier défenseur. Il est également le Marseillais qui a touché le plus de ballons (122, record du match) devant Franck Sauzée (106) et Didier Deschamps (76). Comme souvent, la bataille du milieu a été décisive… Mais le nombre très important de ballons touchés par Alen Boksic et sa zone d’influence montre à quel point l’attaquant a su décrocher pour venir récupérer des ballons ou être disponible pour ses partenaires afin de distribuer le jeu. Avec Rudi Voller et Abedi Pelé sur ses côtés, Alen Boksic a évolué comme un numéro dix. Son nombre de ballons touchés est d’ailleurs plus digne d’un meneur de jeu que d’un attaquant de pointe !

 

Activité défensive
L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «Boksic a joué assez bas pour un 9 et a beaucoup défendu. Desailly est monté assez haut pour aider son équipe. En jouant à 3 axiaux en derrière, un défenseur central peut, si besoin, se permettre de monter pour amener le surnombre.»

 

Heatmap Deschamps

L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «Deschamps a joué dans son rôle de prédilection et a laissé Sauzée se projeter vers l’avant qui est l’Olympien qui a le plus tiré au but (4 tentatives)

 

Heatmap Sauzée

L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «Sauzée et Deschamps ne se sont pas marchés dessus ce qui peut être le cas parfois et cela peut déséquilibrer l’équipe. Un milieu de terrain, Deschamps, est resté dans sa zone alors que Sauzée a évolué box to box entre l’attaque et la défense.»

 

Heatmap Boksic

L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «Cela permet de voir la position du joueur avec le ballon. Boksic n’a pas vraiment joué en pointe, il a joué assez bas pour un 9. Balle au pied, il a beaucoup joué dans l’axe.»

 

Pass sonar

L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «Avec ce schéma on peut voir l’orientation des passes, leur fréquence et leur distance. Barthez a essentiellement joué long par exemple. Deschamps et Sauzée ont principalement joué vers l’avant. Boksic a distribué le jeu en donnant des ballons sur les côtés.»

 

Passes Pelé Sauzée

L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «Pelé a fait beaucoup de passes à Sauzée sans dédoublement et tout s’est joué dans l’axe. Sauzée n’a pas pris le couloir pour faire des centres après une passe de Pelé qui a joué très haut.»

 

Passes Sauzée Pelé

L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «Les passes sont assez longues, il y a peu de passes courtes entre les deux joueurs afin d’utiliser de la vitesse de course de Pelé.»

 

Passes Sauzée Boksic

L’analyse de Benoît Pimpaud, membre de la cellule Football Analytics de l’OM : «Les passes sont toutes vers l’avant. Dans cette relation, Boksic ne revenait pas chercher le ballon, il était directement servi dans sa zone par Sauzée.»

 

L'œil  de Benoît Pimpaud sur la finale : «Le football pratiqué à l’époque est assez différent du foot d’aujourd’hui. Du côté de l’OM, le libero joue plus bas que les deux autres centraux, il n’y a pas de jeu de possession et le jeu est haché avec des changements fréquents de possession. Le jeu était plus direct avec des passes longues et essentiellement tournés vers l’avant. La manière de jouer le hors-jeu est également différente de maintenant.»

 

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